J’ai apporté ma contribution au dossier Grand âge de La Revue du Trombinoscope, en vue de la réforme à venir sur le financement de la dépendance. Je vous invite à lire ma tribune publiée dans le numéro de mai 2023.
Depuis 2019, le grand âge et l’autonomie sont érigés en priorités par le gouvernement. Pourtant, le « virage social » du premier quinquennat n’a jamais été entamé. Une secrétaire d’État y a laissé son maroquin et perdu son siège de députée, conquis par l’extrême-droite. Le symbole est fort. Comment ne pas y voir le présage que tout renoncement se paie au prix fort, tandis que les attentes sont immenses d’un meilleur accompagnement des personnes très dépendantes ?
« La maltraitance […] vise toute personne en situation de vulnérabilité lorsqu’un geste, une parole, une action ouun défaut d’action compromet ou porte atteinte à son développement, à ses droits, à ses besoins fondamentaux ou à sa santé et que cette atteinte intervient dans une relation de confiance, de dépendance, de soin ou d[accompagnement. Les situations de maltraitance peuvent être ponctuelles ou durables, intentionnelles ou non. Leur origine peut être individuelle, collective ou institutionnelle. Les violences et les négligences peuvent revêtir des formes multiples et associées au sein de ces situations. »
Cette définition s’applique d’ailleurs à tous les établissements médico-sociaux.
Chez les personnes âgées, la fédération 3977, qui gère ce numéro d’appel et de soutien, a alerté sur la hausse de 40 % des signalements au premier trimestre 2022. La parution du livre Les Fossoyeurs de Victor Castanet a focalisé les regards sur la manière dont les personnes âgées sont prises en charge dans les établissements, ce qui peut expliquer cette hausse. Loin d’incriminer le seul groupe Orpéa, le 3977 rappelle que ces situations de maltraitances peuvent survenir dans tous types d’établissements, mais aussi au domicile, cadre où le contrôle social est plus ténu.
Une nouvelle étape a été franchie cette semaine dans la libération de la parole : l’ancienne championne de patinage artistique a livré un témoignage poignant, très émouvant, sur les viols et agressions sexuelles dont elle a été victime de la part de son entraineur lorsqu’elle n’était qu’une enfant. Son récit, relayé dans la presse, illustre parfaitement les mécanismes d’emprise – le coach sportif est une personne si influente et importante pour une athlète en devenir que toute résistance est annihilée – et d’amnésie post-traumatique – pour survivre, le cerveau se protège et relègue à l’arrière-plan ces souvenirs douloureux, parfois pendant des dizaines d’années.
Mieux, l’ancienne championne milite ouvertement pour la fin de la prescription des crimes sexuels sur mineur·e·s.
J’ai reçu dernièrement à ma permanence un collectif de proches de malades alcooliques. Elles m’ont livré un témoignage sincère, poignant, sur les souffrances vécues par ceux et celles (ce sont souvent des compagnes ou des épouses) qui côtoient les personnes alcooliques.
Huit à dix millions de personnes concernées en France
Les spécialistes estiment que chaque malade entraine dans son sillage quatre à cinq de ses proches, confronté·e·s à leurs violences, devant faire face à l’épuisement, au surendettement et à la précarité, dont les enfants connaissent l’échec scolaire. Ce sont ainsi entre huit et dix millions de personnes isolées et meurtries par l’alcoolisme.
Un tabou qui maintient ces aidants dans l’ombre
À ce jour, aucune politique de santé publique ne s’adresse à ces proches et ne prend en charge leur accompagnement social et psychologique, pourtant nécessaire.
Les addictologues ne peuvent soigner les malades alcooliques que lorsque ces derniers en ont terminé avec la phase de déni de leur maladie, or à ce stade les dégâts sont déjà profonds chez leurs proches : certain·e·s ont perdu leur travail, se sont isolé·e·s socialement, ont connu une dépression, les enfants ont pu être confronté à de la maltraitance, une déscolarisation…
Le collectif des proches de malades alcooliques dénonce le tabou qui subsiste quant aux souffrances subies.
Une question de santé publique à évaluer et accompagner
J’ai donc saisi Mme Agnès Buzyn, ministre de la santé et des solidarités afin de lui demander la mise en place d’un véritable plan de soutien en faveur des proches aidants de malades alcooliques. Je vous invite à lire la question écrite posée.
J’encourage la ministre à mettre en place une campagne nationale de sensibilisation et d’information, comme le proposent les proches.
Pour en savoir plus, je vous invite à écouter ce témoignage d’Alice, extrait de l’émission Le téléphone sonne diffusée le vendredi 17 mai dernier sur France Inter.