Autonomie : immense décalage entre les attentes des familles et l’ambition du gouvernement

Le sénat vient de débuter l’examen du projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2023, après un examen écourté par l’usage du 49-3 à l’Assemblée nationale.

Je suis intervenue en ouverture de nos débats pour porter l’analyse des sénatrices et sénateurs socialistes sur la cinquième branche de la Sécu, consacrée à l’autonomie. Instaurée en 2020, cette cinquième branche peine depuis à développer ses missions et son budget. Cette année encore, les rares mesures mises en avant par le gouvernement ne permettront pas de répondre aux besoins exprimés par la population confrontée au handicap ou au vieillissement. Le manque d’ambition du gouvernement est flagrant et laisse place à un « immense décalage entre les attentes de la société et la réalité de ce budget ».

J’ai toutefois salué l’introduction de dispositions relatives au renforcement du contrôle financier des ehpads, ainsi qu’à la mise en place d’un accompagnement au lien social pour les personnes âgées dépendantes « manière de reconnaitre les vertus de l’attention au-delà du seul soin physiologique ».

« votre gouvernement ne pourra pas s’en sortir en proposant de
mettre un col roulé à toutes les personnes âgées de nos ehpad…
il n’y a pas assez de personnel pour cela. »

Le changement du paysage de la prise en charge de la perte d’autonomie ne passera que par l’examen d’une loi grand âge et autonomie. Cette loi permettrait de « mettre fin aux injustices face à des incapacités similaires survenues à différentes périodes de la vie ».

Face au gouvernement, j’ai également rappelé la situation alarmante exprimée par le secteur médico-social :

  • Le texte du gouvernement ne répond toujours pas aux exclu·e·s du Ségur (métiers administratifs et logistiques, notamment),
  • Il ne renforce pas l’attractivité de métiers pourtant dangereux « les aides-soignantes s’y épuisent plus que les travailleurs du BTP ».
  • Les 3 000 recrutements affichés dans les ehpads ne représentent même pas un demi poste par établissement.
  • L’inflation n’est pas prise en compte par les prévisions de dépenses médico-sociales « le gouvernement ne pourra pas s’en sortir en proposant de mettre un col roulé à toutes les personnes âgées de nos ehpad ».

Durant les prochains jours, nous procéderons à l’examen des articles et défendrons les amendements des sénatrices et sénateurs socialistes : des moyens nouveaux et des contributions nouvelles, assises sur les dividendes et les bénéfices des ehpads privés, avec pour objectif de remédier aux manques de places et aux délais insupportables : « Les soignantes et les aidants s’épuisent, les familles attendent, agissons ! »

Pour soutenir le médico-social : changer la perception des métiers et étendre le Ségur pour toutes et tous

Manifestation Nantes 28 septembre 2022 Ségur médico-social

Je suis intervenue au Sénat ce jeudi 6 octobre lors d’un débat consacré à l’avenir du secteur médico-social.

Ma première intervention a rappelé que les personnels du secteur – des métiers à prédominance féminine – souffrent d’avoir longtemps été « naturellement » exercées par les femmes. En conséquence, les compétences exercées, la technicité des gestes, la responsabilité dans les relations humaines avec des personnes vulnérables sont sous-estimées et induisent de faibles rémunérations et des temps de travail scindés.

J’ai rappelé l’urgence de tourner le dos à cette vision rétrograde pour considérer à leur juste valeur les métiers du lien… les rémunérer en conséquence et permettre une meilleure attractivité du secteur.

« C’est historique et culturel, les fonctions du care souffrent d’avoir longtemps été « naturellement » exercées par les femmes ; moins un métier qu’une occupation, une inclination personnelle, une vocation, cette appréciation rend invisibles les compétences exercées, la technicité des gestes, la complexité des relations humaines construites avec les personnes vulnérables et leurs familles. »
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Détecter et éviter la maltraitance : une ambition pour le grand âge

Officiellement, la maltraitance en ehpad dispose d’une définition légale depuis quelques mois :

« La maltraitance […] vise toute personne en situation de vulnérabilité lorsqu’un geste, une parole, une action ou un défaut d’action compromet ou porte atteinte à son développement, à ses droits, à ses besoins fondamentaux ou à sa santé et que cette atteinte intervient dans une relation de confiance, de dépendance, de soin ou d[accompagnement. Les situations de maltraitance peuvent être ponctuelles ou durables, intentionnelles ou non. Leur origine peut être individuelle, collective ou institutionnelle. Les violences et les négligences peuvent revêtir des formes multiples et associées au sein de ces situations. »

Cette définition s’applique d’ailleurs à tous les établissements médico-sociaux.

Chez les personnes âgées, la fédération 3977, qui gère ce numéro d’appel et de soutien, a alerté sur la hausse de 40 % des signalements au premier trimestre 2022. La parution du livre Les Fossoyeurs de Victor Castanet a focalisé les regards sur la manière dont les personnes âgées sont prises en charge dans les établissements, ce qui peut expliquer cette hausse. Loin d’incriminer le seul groupe Orpéa, le 3977 rappelle que ces situations de maltraitances peuvent survenir dans tous types d’établissements, mais aussi au domicile, cadre où le contrôle social est plus ténu.

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Oublié·e·s du Ségur de la santé : où en est-on ?

Manif Ségur pour tous le 17/11/2021 à Nantes

« Ne pas soutenir le soin, c’est ruiner la solidarité qui fonde l’état de droit. »

Cynthia Fleury, philosophe

Mercredi 5 janvier dernier, les sénatrices et sénateurs socialistes ont inscrit à l’ordre du jour du Sénat un débat consacré aux oublié·e·s du Ségur de la santé.

Comme je l’ai rappelé en conclusion de ce débat, « l’urgence de la situation sanitaire ne pouvait pas laisser à l’arrière-plan la question des conditions de travail, de carrière et de rémunération dans l’ensemble du secteur élargi des soins. »

Depuis l’été 2020, des séries de mesures successives ont été prises par le gouvernement pour revaloriser l’exercice des métiers de la santé et du soin, dans une contexte de tensions hospitalière exacerbé par la crise sanitaire. Une première revalorisation de 183 euros mensuels avait négligé nombre de métiers de « première ligne » pourtant essentiels au quotidien dans les établissements médicaux et médico-sociaux.

Lors de l’examen du budget de la Sécurité sociale j’avais d’ailleurs rappelé les profondes déstabilisations engendrées par ces revalorisations partielles. Une concertation, la mission Laforcade, a été lancée au printemps 2021 pour améliorer l’attractivité du secteur. Elle devait déboucher sur une conférence nationale fin 2021, puis en cette mi-janvier… à nouveau repoussée.

J’ai profité de ce débat pour rappeler que subsistent toujours de nombreux oublié·e·s du Ségur :

« Animatrices et animateurs de la territoriale dans les résidences autonomie…
dans les hôpitaux, ambulanciers et équipiers des Samu, auparavant alignés sur les aides-soignants, n’ont pas été reconnus comme étant au contact des patients. La liste n’est pas exhaustive. »

Cette conclusion du débat m’a permis d’évoquer deux aspects essentiels pour l’attractivité et la reconnaissance des métiers du secteur sanitaire et social :

  • la nécessité de mettre un terme à l’embauche de personnel « faisant fonction » : des personnes embauchées sur des postes supérieurs à leur qualification (parfois un dixième des effectifs dans les fonctions d’aide-soignantes) : ce nivellement par les bas des métiers du soin est la négation même des spécificités de ces métiers et freine toute perspective professionnelle.
  • la mise en place de temps de réflexion sur leur pratiques professionnelles, piste à creuser pour renforcer l’attrait pour les métiers du soin et de l’accompagnement médico-social
« la désaffection des métiers du prendre soin n’est pas inéluctable, des pistes sont proposées, elles méritent autant d’attention que ces professionnel·le·s en accordent chaque jour à nos proches. »

Photo : Manifestation « Ségur pour tous » le 17/11/2021 à Nantes

PLFSS : un budget d’esquive et de fin de quinquennat

Manifestation Nantes Ségur pour tous handicap protection enfance médico social

COMMUNIQUÉ DE PRESSE

Mardi 16 novembre 2021

Le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain (SER) s’est opposé au projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2022. Un budget qui esquive les véritables enjeux et ne tire pas les leçons de la pandémie. Un budget de routine, quand notre système de santé aurait besoin d’un budget de combat.

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Quel droit à la protection contre les violences sexuelles pour les personnes handicapées ?

Handicap sign CC-by Steve Johnson https://flic.kr/p/82pNuh

À l’initiative du groupe des élu·e·s communistes, républicains, citoyens et écologistes, le Sénat a mené un temps de débat consacré aux personnes en situation de handicap, sous l’intitulé Les droits des personnes en situation de handicap sont‑ils effectifs et respectés ?

Je suis intervenue lors de ces échanges pour évoquer l’un de ces droits, le droit à la protection contre les violences sexuelles.

«  Les personnes handicapées ont le droit à la protection contre toutes formes d’exploitation, de violence et de maltraitance, à leur domicile comme à l’extérieur, y compris leurs aspects fondés sur le sexe. »

Article 16 de la Convention relative aux droits des personnes handicapées
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Comprendre la déception des oublié·e·s du Ségur de la Santé

16 juin 2020, manifestation de soignant·e·s à Nantes

Hier, mercredi 17 février, je suis intervenue au Sénat au sujet des « oublié·e·s du Ségur ». Cette expression désigne les professionnel·le·s du secteur médical et médico-social qui ne bénéficient pas des revalorisations salariales accordées en juillet 2020 suite au Ségur de la Santé. La concertation initiée à l’issue du premier confinement avait abouti à des revalorisations qui ne concernaient que les soignant·e·s des hôpitaux publics et EHPAD adossés à ces hôpitaux. Par la suite, la négociation a étendu ces revalorisations aux hôpitaux privés.

À ce jour, l’ensemble des agents et salarié·e·s du médico-social ne sont toujours pas éligibles à cette revalorisation.

J’ai donc tenu à souligner cette injustice hier au Sénat au cours de l’examen d’une proposition de loi consacrée aux dispositions non financières du Ségur.

Vous pouvez retrouver cette intervention en vidéo ci-dessous.

« Selon qu’elles exercent le même métier dans ces structures plutôt qu’à l’hôpital, elles ne bénéficient pas de la revalorisation salariale. C’est le cas notamment aux établissements de Mindin à Saint-Brevin-les-Pins dans mon département, dont les soignant·e·s bruleront symboliquement leur diplômes demain devant la sous-préfecture de Saint-Nazaire »

Photo : 16 juin 2020, manifestation de soignant·e·s à Nantes.